Le début du film est d'un classicisme éculé : mélodrame lent et posé, avec une narration à base de plans fixes et de longs silences. Une femme mourante dans un hôpital, son mari effondré, un gamin se promenant seul dans les couloirs aseptisés avec un cadeau pour sa mère : on est en terrain connu mais l'émotion passe...
Plus tard l'enfant a mûri et le père est toujours seul, consacrant tout son temps et son énergie à son travail. Portrait d'un homme veuf élevant un fils adolescent, puis portrait d'une femme japonaise discrète, effacée et ancrée dans une tradition où la femme joue un rôle essentiellement utilitaire et décoratif, le film de Miike rend rapidement ses personnages attachants et intrigants. Le réalisateur de Bird People in China et de Dead or Alive sait comment on intéresse le spectateur à un histoire ou à un individu.
Takashi Miike enchaîne, avec les même codes narratifs, sur une histoire d'amour naissant entre le vieux veuf et la femme discrète. Ils se sont rencontrés lors d'une audition organisée par un ami du veuf qui veut le voir heureux et remarié. L'ami en question trouve la femme étrange car il n'arrive pas a avoir la moindre information sur elle, même son adresse, mais le veuf est amoureux. Le spectateur a la tête ailleurs et ne s'attache pas aux détails.
Et puis le couple passe une nuit dans un hôtel - lors d'une scène d'une pudeur étonnante quand on sait ce dont quoi est capable Miike, et au petit matin la femme n'est plus là. Commence alors un glissement vers l'horreur et un dérapage d'une telle vitesse que son imprévisibilité fait figure de référence.
La fin est si abrupte, insoutenable et terrorisante que le film créa rapidement un phénomène de culte encore très actif sur le net. Entre temps Takashi Miike est passé du rang d'artiste underground dont les films non diffusés en Europe s'échangent sous le manteau à celui d'incontournable du cinéma japonais, mais Audition reste une claque. Je dirais même une des plus grandes claques du cinéma !
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