Tourné sur 35mm et long de seulement 7 minutes, ce court-métrage en noir et blanc réalisé par Marcel Duchamp en collaboration avec Man Ray et Marc Allégret est un classique du cinéma expérimental. Il se rattache au mouvement Dada et se démarque par son absence de scénario et de mise en scène. Il est seulement constitué d'une succession de plans fixes sur des spirales en rotation. On peut résumer le film en précisant que sur les 19 disques hypnotiques, 9 contiennent des fragments textuels nonsensiques de Rrose Sélavy pendant que les 10 autres sont simplement des spirales semblables à celle de l'affiche ci-dessus. Si vous avez l'œil exercé vous arriverez donc à déchiffrer "On demande des moustiques domestiques (demi-stock) pour cure d'azote sur la Côte d'Azur", "Esquivons les ecchymoses des esquimaux aux mots exquis" ou "Avez-vous mis la moelle de l'épée dans le poêle de l'aimée".
Oeuvre abstraite se rapprochant plus de l'art plastique en mouvement que de l'invention des frères Lumière, Anémic Cinéma est l'équivalent cinématographique de la célèbre Fontaine du même créateur : un machin basé sur le culot et la performativité de l'art dont le concept résume tout. Vous n'attendiez pas un Citizen Kane de la part de l'artiste ayant rajouté des moustaches à la Joconde (L.H.O.O.Q, 1919) et ayant inventé les readymades, objets neutres exposés tels-quels (Roue de bicyclette, Pharmacie et Porte-bouteilles).
Pour du cinéma expérimental on est loin du surréalisme d'Un Chien Andalou ou de la légèreté poétique propre à l'Entr'acte de René Clair. C'est des spirales et c'est vous qui voyez si ça mérite le détour. Mais ne serait-ce pas une sorte d'ancêtre à l'Uzumaki de Higuchinsky ?
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