mardi 6 décembre 2011

Hara-kiri de Takashi Miike

Hara-kiri, mort d'un samouraï (Ichimei en VO) est un film japonais réalisé par Takashi Miike. Sorti en 2011, il est interprété par Ebizo Ichikawa, Eita Nagayama, Koji Yakusho, Hikari Mitsushima et Munetalla Aolli.



Hanshiro, un samurai sans emploi suite à la déchéance de son clan, vient présenter une requête exceptionnelle au seigneur Kageyu : il demande la permission de se faire seppuku sur son seuil, n'ayant plus les moyens de vivre et voulant mettre honorablement fin à ses jours. Kageyu lui raconte alors une histoire : celle d'un jeune ronin famélique étant venu faire une requête similaire quelques années plus tôt.

Ce nouvel Hara-kiri est la second adaptation à l'écran d'un roman de Yasuhiko Takiguchi. Tous les amateurs de cinéma se souviennent de Hara-kiri (Seppuku en VO) réalisé par Masaki Kobayashi en 1962, un des films de samurai mythiques ayant participé à la popularisation du genre (Prix du jury au Festival de Cannes en 1963). S'attaquer à un tel chef-d'œuvre intemporel était un pari très risqué, mais Takashi Miike s'en tire remarquablement bien et nous signe un film émouvant, très travaillé et digne de son titre.

Oubliez Ichi the Killer, Audition et Visitor Q. Oubliez même Izo, qui pourtant traitait également du destin d'un ronin. Ici nous naviguons à des kilomètres du style brouillon qui caractérisait les premiers film du stakhanoviste japonais. Et nous sommes plus loin encore de la dimension parodique et ludique qui définissait Yatterman, Sukiyaki Western Django ou The Great Yokai War. Après avoir tourné plus de 70 films en 20 ans, Miike nous prouve qu'il peut encore nous surprendre.

Tourné en 3D, le film de Miike passe bien en 2D. Ses cadrages larges et précis, évoquant Akira Kurosawa, sont d'une lisibilité exemplaire et participent à la poésie qui se dégage de chaque scène. L'essentiel du métrage est constitué de discussions très posées : d'abord celle entre Kageyu et Hanshiro qui sert de point de départ et de trame au film, mais également celles qui rythment la vie quotidienne de la famille de Hanshiro, avant le drame. L'histoire est ainsi mise en place en trois flash-backs, avant de se terminer sur une scène épique et tragique, qui paradoxalement est infiniment moins violente que celle qui clôturait le film de Kobayashi.

Là où Miike brille particulièrement, c'est dans la description mélodramatique d'une famille aimante sapée par la misère et la maladie. On pense alors au cinéma de Kenji Mizoguchi... L'empathie pour ces personnages est telle que l'objectif du film est finalement atteint : dénoncer une société féodale lâche et persuadé de sa propre supériorité et de son sens aigu de l'honneur. Avec justesse, Hara-kiri nous démontre qu'il y a plus de noblesse dans cette famille pauvre et en loque, armée de sabres de bois, que dans cette armure vide qui sert de symbole au clan Li.

Bien entendu, il est impossible d'égaler le film de Kobayashi, qui est quasi-parfait, mais ce nouveau Miike est exceptionnel. La façon dont il renoue avec un cinéma traditionnel à la Kurosawa et Hiroshi Inagaki tout en critiquant les valeurs féodales en font un monument qui doit être vu. Hara-kiri est le meilleur chanbara tourné depuis Le samouraï du crépuscule de Yôji Yamada.

1 commentaire:

Fr@nKeIn$OuNd a dit…

Cela me donne vraiment envie de le voir.
Son épisode de "master of horror":"imprit" en a traumatisé plus d'un....
merci pour ce bon article.