samedi 29 octobre 2011

Naqoyqatsi de Godfrey Reggio

Naqoyqatsi est un documentaire américain réalisé par Godfrey Reggio en 2002. Il est produit par Steven Soderbergh.



Naqoyqatsi est le dernier volet de la Trilogie des Qatsi, une série ambitieuse de documentaires muets dont le tournage s'est étalé sur plus de 25 ans. Considérés comme séminaux, ces films ont engendrés une multitude de rejetons, dont le plus connu est Baraka.

Devenu réalisateur, Ron Fricke cède sa place de directeur artistique à Russell Lee Fine, qui brille par son sens aigu du cadrage et de la composition, mais dont certains choix sont discutables. Il y a notamment dans Naqoyqatsi une foule de séquences en images de synthèses. Or, en 2002, les logiciels de rendus laissaient encore à désirer, si bien que Naqoyqatsi semble au final plus obsolète que Koyaanisqatsi et Powaqqatsi (qui sont atemporels). D'un autre côté, ces plans numériques trop lisses et trop parfaits ont un certain charme mathématique.

Le titre Naqoyqatsi est un mot Hopi, une langue uto-aztèques qui n'est plus parlée que par un très faible nombre de locuteurs dans le monde. Cela résulte d'une volonté délibérée de s'affranchir du verbe. En Hopi, nahqoy signifie violence extrême et qatsi signifie vie. Car Naqoyqatsi est censé être un exercice sur la guerre et la violence des civilisations modernes.

Le film s'ouvre sur la Tour de Babel de Pierre Bruegel et enchaine sur des images d'une gare désaffecte (la Michigan Central Station, à l'abandon depuis 1988). Jusque là on peut faire un parallèle. Suit un plan sur un océan déchainé, puis c'est un lac capturé avec un intervallomètre. Fondu... et un travelling arrière dans le désert se termine sur une pyramide numérique qui pousse...

Le ton est donné : Naqoyqatsi est bien plus abstrait et surréaliste que ses ainés. On passe beaucoup de temps à se demander ce qu'on regarde. Peut-être est-ce pour souligner que nous vivons dans un monde de technologie, de synthétique et de virtuel. Un monde de guerre qui n'a ni sens ni but. Terriblement innovant, le dernier film de Godfrey Reggio a autant sa place dans un musé d'art contemporain que dans un cinéma. Vous y verrez en vrac de explosions atomiques, la bourse de New-York, les Beatles et des girafes...

Un effort permanent est fait pour présenter des séquences novatrices, notamment par le recours à l’imagerie scientifique (microscopie optique, rayons X, tomographie, simulations numériques en mécanique des fluides, triangulations, maillages 3D, rendu de voxels, ensemble de Mandelbrot, raytracing, raycasting). Ajoutez à cela des images tirées de Doom II, de Perfect Dark et d'Anima Mundi (un autre documentaire de Godfrey Reggio)... Et vous obtenez une salade étrange et fascinante, qui intrigue du début à la fin.

Même si la guerre semble le thème marquant de Naqoyqatsi, l'œuvre est impossible à résumer ou à synthétiser. Il faut la voir de ses propres yeux (un peu comme la matrice). C'est certainement le volet le plus difficile à aborder de la Trilogie des Qatsi, donc si vous n'avez pas supporté les deux autres vous pouvez passer votre chemin. Dans le cas contraire, foncez l'acheter, le télécharger ou l'emprunter.

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