lundi 19 septembre 2011

Exit Through the Gift Shop de Banksy

Exit Through the Gift Shop est un documentaire anglais réalisé par Banksy, sorti en salle en 2010. Il met en scène Shepard Fairey, Thierry Guetta, Rhys Ifans, Space Invader, Jay Leno et, bien sûr, Banksy.



Le point de départ, c'est ce personnage excentrique : Thierry Guetta, un français qui vit aux états-unis en vendant des vêtements vintage à prix d'or. Sa passion, c'est filmer. Il se promène partout avec caméscope et capture ce qu'il voit en permanence. Un jour, il découvre que son cousin est Space Invader, un artiste urbain connu pour ses mosaïques tirées du célèbre jeu vidéo, dont les réalisations sont visibles à Paris, mais aussi à Los Angeles ou à Hong Kong. Alors Thierry commence à filmer son cousin dans ses expéditions nocturnes pour décorer Paris. Escalader de toits et de clôtures, explorer la jungle urbaine la nuit, fuir devant les agents de sécurité et la police... Tout cela est excitant.

De proche en proche, il rencontre d'autres acteurs du street art. Il décide alors de faire un documentaire sur cette nouvelle forme d'expression. Et notamment sur Banksy, la personnalité la plus célèbre et la plus mystérieuse du milieu (sachant que personne ne connait son identité, c'est mal partit).

Seulement Exit Through the Gift Shop n'est pas un film sur Banksy. C'est un film de Banksy. Ses apparitions, masqués, sont nombreuses mais ne servent que de fil narratif. Avec sa voix déformée pour être méconnaissable, il nous raconte une fable mémorable.

Après des années passées au près d'une multitude d'artistes, Thierry rencontre Banksy et le suit pendant plusieurs mois. Le problème, c'est que notre aspirant réalisateur a plus de 10 000 heures de rushes mais n'a jamais rien monté. Il filme et met ses cassettes dans des cartons, sans jamais rien visionner. Quand Banksy le convainc de faire un montage, il est incapable de tirer de ses archives un résultat cohérent. Cela donne juste un clip halluciné et cauchemardesque, intitulé Life Remote Control.

Du coup, Banksy lui demande les rushs et fait son propre montage. N'étant pas mégalomane, il ne fait pas un documentaire sur lui-même, mais un documentaire sur le documentaliste. Sauf que Banksy est un iconoclaste qui s'amuse avec le monde de l'art (à travers des cambriolages inversés, il a rajouté certaines de ses œuvres dans plusieurs musées).

Du coup Banksy aide Thierry à se lancer dans le marché de l'art. Et c'est cette histoire que nous raconte le film. L'histoire d'un homme qui ne sait même pas peindre, et qui doit donc employer des artistes pour scanner et photoshoper des œuvres déjà existantes. Cette inconnu, pas doué avec un pinceau, mais redoutable dès qu'il s'agit de marketing viral, qui réalise sa première exposition et qui vend pour plus d'un million de dollars de créations en l'espace de quelques jours. C'est la démonstration que la subversivité peut devenir un produit de consommation de masse, correctement emballé.

Exit Through the Gift Shop est un documentaire inclassable. Il y a débat pour savoir s'il s'agit d'un canular de Banksy ou d'une histoire vraie. Personnellement, je pense que c'est l'histoire vraie d'un canular, et que la blague c'est que justement que Thierry est réel. Son exposition a bien eut le succès décrit et ses œuvres se sont bien négociées aux tarifs annoncés. Cela n'empêche pas l'homme d'être une sorte de pied-de-nez au monde artistique. Une blague potache créé par un Banksy qui veut montrer qu'avec un peu de bouche à oreille, et en copiant Warhol, il est possible de vendre de simples réalisations faites au pochoir par les équivalents picturaux des nègres littéraires.

A moins que Thierry ne soit qu'un acteur dirigé par Banksy et que le film soit, comme le F for Fake d'Orson Welles, un mensonge sur le mensonge. Comme le dit Steve Lazarides, le porte parole de Banksy :

I think the joke is on... I don't know who the joke is on, really. I don't even know if there is a joke.

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